Le peintre EMILE BERNARD
Qui était Emile Bernard ?
Emile Bernard naît à Lille en 1868. Son père travaille dans l’industrie du
textile. Emile a dix ans lorsque la famille déménage à Paris, suite à la
promotion du père, devenu directeur de la ville de Barbizon en Seine-et-Marne succursale parisienne d’une compagnie textile. Déjà doué pour la peinture, le jeune Emile suit des cours de dessin à l’école des Arts Décoratifs. C’est grâce à un ami de la famille, le peintre russe Michail de Wylie, qu’Emile Bernard intègre l’atelier Cormon à l’âge de 16 ans, au cœur de la bohême artistique de l’époque, Montmartre.
Emile Bernard a eu un rôle majeur dans les influences et les inspirations de
l’école de Pont-Aven, quoiqu’en aient retenus les partisans d’un autre maître de la peinture, Paul Gauguin…
La formation d’Emile Bernard à Montmartre et le début d’un nouveau mouvement artistique
Emile Bernard commence sa formation à Montmartre à l’atelier Cormon à l’âge de 16 ans. Cette école a été fondée par le peintre Fernand Cormon en 1882. A partirde 1884, l’atelier devient une école située au 104 boulevard de Clichy, et accueillant des artistes qui marqueront l’histoire de la peinture.
Emile Bernard fait donc partie de ces élèves, et se lie d’amitié avec ses camarades Henri de Toulouse-Lautrec, mondialement connu pour ses
affiches, Vincent Van Gogh et Louis Anquetin.
Ce dernier a sept ans de plus qu’Emile, et il va devenir un ami que le jeune lillois gardera jusqu’à la fin de sa vie. Louis Anquetin n’était jamais bien loin d'Henri de Toulouse-Lautrec, qu’il avait pris sous sa protection pour lui éviter les railleries et les quolibets, à cause de sa petite taille. Anquetin et Toulouse-Lautrec vont faire découvrir à Emile Bernard les cabarets montmartrois et l’ivresse de la bohême. Emile devient un habitué du Lapin-Agile, situé juste à côté de la Cité Cortot, et suit Henri de Toulouse-Lautrec dans ses pérégrinations nocturnes au Moulin-Rouge.
Deux ans après avoir intégré l’Atelier Cormont, Emile Bernard s’en fait expulser. Le lillois devenu montmartrois se montre indiscipliné, et ses idées
sont jugées trop avant-gardistes.
Pointillisme, cloisonnisme et l’école de Pont-Aven
Le portrait d'Emile Bernard réalisé par Toulouse-Lautrec dénote l’utilisation d’un nouveau procédé artistique qui voit le jour, le pointillisme.
À cette époque, le pointillisme, dont le peintre Georges Seurat est devenu l’emblème, influence les artistes de la Butte Montmartre, notamment Vincent Van Gogh, qui vit au 54 rue Lepic avec son frère Théo, le marchand d’art.
Emile Bernard va se rapprocher de Vincent Van Gogh lorsque celui-ci habite à Paris pendant l’hiver 1886-1887, et traverser sa propre période pointilliste.
Ensemble, ils vont exposer au café « Le Grand Bouillon », situé au 43 avenue de Clichy.
A leurs côtés exposent les amis d'Emile Bernard, Henri de Toulouse-Lautrec et Louis Anquetin.
Quelques mois plus tard, Émile Bernard et Louis Anquetin mettent en commun leurs recherches et leurs inspirations, et élaborent un nouveau courant artistique : le cloisonnisme. Le cloisonnisme consiste à utiliser des aplats de couleurs séparés par un contour sombre, à la manière des émaux et des vitraux médiévaux cloisonnés. Si, à l’époque, Louis Anquetin récolte seul les lauriers pour l’utilisation de cette nouvelle technique, Emile Bernard va s’en servir pour fonder ce qu’on appelle l’école de Pont-Aven.
A l’été 1888, Emile Bernard prend la direction de la Bretagne pour rejoindre Pont-Aven. Paul Gauguin est présent, et les deux artistes se rencontrent à la pension Gloanec. Marie-Jeanne Gloanec hébergeait les artistes dans sa pension en pension complète, c’est-à-dire qu’elle leur servait les repas. Pour la nuit, les artistes logeaient chez l’habitant, sauf quelques locataires privilégiés, au nombre de quatre, maximum. Le jeune Emile Bernard ne fait pas partie de ces pensionnaires considérés plus importants que les autres, mais cela l’importe peu. Lui meurt d’envie de défier les convenances artistiques de l’époque. Or, la ville de Pont-Aven s’y prête parfaitement. Ce qui deviendra l’école de Pont-Aven a commencé avec un enthousiasme fort des artistes pour cette petite ville du Finistère, initié par Paul Gauguin. Pont-Aven est encore surnommée « la cité des peintres » de nos jours. Tout comme la ville de Barbizon en Seine-et-Marne qui influença les pré-impressionnistes, Pont-Aven est un nouvel eldorado pour les peintres de l’époque, plein d’espoirs et d’inspirations diverses. La ville est colorée et agréable, et les habitants se mêlent joyeusement à cette frénésie artistique naissante. Ils acceptent volontiers de servir de modèles, à des tarifs bien plus bas que les modèles de Paris et de la place Pigalle. Tout comme la butte Montmartre, le faible coût de la vie et le charme de la ville ont séduit les artistes venus prendre part à cette nouvelle cité d’artistes à ciel ouvert. Les greniers et les appentis de la ville sont occupés par les peintres qui les ont transformés en ateliers. Autour de la personnalité de Gauguin naît l’école de Pont-Aven (ou école synthétiste), et son style reconnaissable : en réaction à la crise de l’impressionnisme, qui représentait les apparences, les contours, le synthétisme et le symbolisme de l’école de Pont-Aven vont travailler sur des aplats de couleur représentant des scènes de la vie locales et épurées, comme un retour à une simplicité dans la représentation (comme Les Bretonnes aux ombrelles, ou encore la Moisson au bord de la mer, d’Emile
Bernard). Les calvaires bretons ou encore les estampes japonaises sont à l’origine d’un autre mouvement développé par l’école de Pont-Aven : le cloisonnisme, dont Emile Bernard et Louis Anquetin avaient défini les codes à Montmartre.
Paul Gauguin et Emile Bernard sont les deux grandes figures de l’école de Pont-Aven. Emile Bernard étant très croyant, il va influencer Paul Gauguin dans de nouveaux choix de sujets, plus empreints de spiritualité. Gauguin va
alors s’inspirer de vitraux médiévaux, d’estampes japonaises, puis ira jusqu'à Tahiti, à la recherche d’un exotisme plus fort.
Outre Bernard et Gauguin, les peintres les plus représentatifs de l’école de Pont-Aven sont Charles Laval, Charles Filiger, Emile Schuffenecker, Léon Fauché, Henry Moret, Louis Roy…
L’année suivante, en 1889, Emile Bernard fait partie des peintres refusés à l’Exposition Universelle. Avec ses camarades de l’école de Pont-Aven, ils vont exposer sur les cimaises du Café des Arts, situé à l’extérieur de l'exposition Universelle, et tout proche des accès de l’exposition. L’exposition Volpini, du nom du gérant du Café des Arts, présente des œuvres du mouvement synthétiste. Bernard est l’artiste le plus prolifique de cette exposition, présentant à lui seul 25 toiles.
Cette exposition n’a pas été un succès, mais plutôt un moyen de faire parler de ce nouveau mouvement. En effet, aucune toile n’a été vendue.
En 1891, l’amitié tumultueuse qui unissait Emile Bernard et Paul Gaguin va prendre fin, avec le départ de ce dernier pour Tahiti. Emile Bernard reprochait à Gauguin de s’attribuer tous les mérites et toutes les innovations de l’école de Pont-Aven.
L’orientalisme et la rencontre avec Paul Cézanne
L’œuvre de Bernard va prendre une nouvelle tournure. Finies les accointances avec Gauguin, Emile Bernard s’inspire désormais de l’orientalisme. Féru de mysticisme et d’idéalisme, Émile Bernard se plonge dans l’art byzantin et l’art
médiéval. Suivant son inspiration de l’époque, Emile Bernard part vivre en Egypte en 1893. Ce voyage lui permet aussi de mettre de la distance avec sa vie d’avant, et de fuir pour un temps la France qui avait été le théâtre de sa brouille avec Gauguin. En Egypte, il commence par décorer le collège Saint Louis de Tantah, en 1894. Puis, Bernard s’intéresse à de nouveaux modèles,
aux femmes égyptiennes d’ethnies différentes et aux scènes de la vie locale (Femmes au bord du Nil, Musiciens arabes). Il épouse la jeune Hanenah, et vécut dix ans en Egypte.
Lorsqu’Emile Bernard rentre à Paris en 1904, il rencontre le peintre Paul Cézanne. Plusieurs années auparavant, Bernard avait été charmé par le travail de Cézanne, lorsqu’il avait découvert ses peintures dans la boutique du Père Tanguy rue Clauzel, non loin de la butte Montmartre. La simplification
des formes et l’usage concret, direct, de la couleur l’avaient attirés, et il s’en était fait le fervent défenseur. Afin d’échanger et d’apprendre de celui qu’il
admirait, Emile Bernard part vivre un an à Aix-en-Provence, pour être proche de Paul Cézanne, comme un dernier voyage significatif dans sa recherche artistique.
Emile Bernard meurt sur l'île Saint-Louis mais garde Montmartre au cœur
Emile Bernard est resté très proche de ceux qu’il considérait comme ses vrais amis. Parmi eux, le plus fidèle était Louis Anquetin, rencontré à l'atelier Cormon à Montmartre. Un an avant la mort d’Anquetin, Emile Bernard réalise
un portrait de son ami, qu’il lui dédicace « A Louis Anquetin en témoignage de ma plus profonde admiration ». Montmartre est resté dans son cœur, lui qui y
revenait entre chaque voyage. Emile Bernard a vécu à la Cité Cortot à Montmartre, comme d’autres artistes de renom. Cette ancienne cité d’artistes est connue aujourd’hui pour être l’actuel musée Montmartre, qui abrite notamment une superbe reconstitution de l’atelier de la peintre Suzanne Valadon, son
compagnon André Utter et son fils Maurice Utrillo, tous les trois surnommés le « trio infernal ».
Emile Bernard meurt en 1941 à Paris, à l'hôtel le Charron où il vivait, hôtel particulier situé au numéro 15 du quai de Bourbon, sur l'île Saint-Louis, au centre de Paris. Il laissa derrière lui un héritage artistique très riche, rempli d’expériences picturales avant-gardistes.
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Emile Bernard de LEHMAN-F
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